Vampyres

vampyres laurent courau

Laurent Courau (2006) – Collection Pop CulturesEditions Flammarion

Vampyres, un livre de Laurent Courau, illustré par de splendides photos de Lukas Zpira est une enquête sur les groupes de vrais vampires qui hantent New York, mais aussi la Hollande, et la France.

Vous y trouverez une interview exclusive de Marcos Drake, de Father Sebastian, de Jean Paul Bourre et bien d’autres.

Une interview de Laurent Courau, dés que j’ai le temps, il la mérite.

Henry Fuseli

Né Johann Heinrich Fussli en Suisse, il déménage en Angleterre en 1764 et change son nom pour Henry Fuseli. Il est encouragé par le peintre anglais Sir Joshua Reynolds, et étudie l’oeuvre de Michelangelo en Italie de 1770 à 1778 avant de s’installer à Londres en 1779.

Le théatre de Londres, dont particulièrement les productions de Shakespeare, allument son imagination, et pendant les années suivantes il peint, grave et dessine plusieurs scènes de pièces de théatre.

Il admire les poètes du Romantisme, et plusieurs de ses illustrations pour Shakespeare et Milton (et d’autres poètes) revèlent son amour du grotesque, du sublime et du fantastique ainsi qu’une fascination pour le monde des rêves. Il est reconnu pour son travail expressif et ses oeuvres historiques souvent mélodramatiques, qui lui gagnent une place à l’Académie Royale en 1799 et le titre de Gardien pour l’Académie en 1804.

Le syndrome de Renfield

reinfieldLes psy (chanalystes, chiatres, logues, chotrucs), pour expliquer les cas dont ils s’occupent et tout faire rentrer dans des cases bien comme il faut, aiment bien se référer à des mythes. Freud, c’était Oedipe, pour les tueurs sanguinaires, il y a les vampires. Sans compter que c’est un mot qui plaît particulièrement aux media et aux procureurs dans les affaires les plus sordides : “vampire” devient synonyme de “monstre”, alors que souvent, le comportement du tueur n’a pas de rapport, à proprement parler, avec le vampirisme clinique. On parle donc fréquemment de vampires pour des meurtres choquants, mais les véritables cas de vampirisme clinique, comme les décrit Richard Noll, sont finalement assez peu courants.

Il me semble pourtant que l’on pourrait, au vu de la nature des actes commis et des antécédents parfois connus, rapprocher certains criminels de cette typologie : Fritz Haarman, Peter Kürten, Andrei Chikatilo, ou encore John Haig ; le cas de Richard Trenton Chase semble vraiment assez particulier…

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Carmilla

D’abord, c’est pas un pavé

Oui enfin, on est plus en CP, on sait lire autre chose que les Tom-Tom et Nana ou autres Titeuf. Mais bon, au moins ceci excusera les quelques légèretés, voire incohérences, du scénario. Carmilla, ce sont 100 pages, divisées en 16 chapitres. Donc, ça fait environ 6 pages le chapitre. C’est court, et en plus, c’est agréable à lire.

Mais voilà, on peut déjà remarquer cela

L’histoire, je l’ai résumée, et ça fait un peu caricature. Et c’est pourtant pas loin de la vérité. Si Le Fanu avait pris le temps d’y ajouter 100 pages, on aurait pas senti le truc gros comme une cathédrale gothique qu’est la révélation finale sur l’identité de Carmilla.

Bon ok, en lisant Carmilla, je savais que j’allais lire un livre de vampire. Mais au XIXème siècle, Dracula n’était pas encore écrit. Le vampire était connu, mais Sheridan traitait plus les histoires de fantômes dans les châteaux en ruine que les histoires de vampires dans des… euh, tiens, un château en ruine !

Bon, bref, passons sur les clichés de la littérature gothique, à l’époque il ne s’agissait peut-être pas encore de clichés. Mais là, dès l’arrivée de Carmilla, on sait déjà qui elle est ! Ca se sent tellement ! Alors, c’est sans doute fait exprès ? Sans doute oui. Suggérer au lecteur que Carmilla est plus que ce que croient Laura et son père. Mais il n’empêche que pas un instant, en cent pages, pas un instant l’un d’eux fait le lien entre Carmilla et la jeune fille qu’a hébergé leur seul voisin. Et pourtant, il n’y a pas l’air d’avoir beaucoup d’agitation dans le coin. A vrai dire, des meurtres, il doit pas y en avoir tous les jours pas chez eux.

Je résume donc le problème ainsi :
1. Les gentils sont cons
2. Pas nous
3. Je suis sensible à la flatterie, mais là, j’ai l’impression d’être si intelligent que j’aurais pu faire Van Helsing.

Donc, je n’aime pas trop que l’auteur me prenne pour un con.

Qu’il est méchant ! Mais il a quoi contre ce livre ?

Moi ? Ben rien justement ! Maintenant que j’ai dit ce qu’il y avait de déplaisant à dire, passons à l’éloge, et là, j’ai autant, voire plus, de choses à dire. Ce livre est une merveille. Le roman se présente sous la forme de confidences rédigées par Laura des années après. Du coup, Laura malgré toute sa connerie paraît fort attachante. Sublime mélange de niaiserie et de pureté, elle est la cible parfaite pour le vampire Carmilla. Et Carmilla ? Pareille, sublime demoiselle ! La grâce d’un félin (elle se change en chat noir), le mystère d’une Marilyn Monroe en fin de carrière (pourquoi j’ai choisi cet exemple ? je vois pas le rapport) et les talents de libertine tentatrice font de cette merveilleuse adolescente un archétype de femme fatale, de vamp, de femme vampire belle et fragile en opposition à la robustesse d’un Lord Ruthven ou d’un Dracula. Car Carmilla fait fragile, limite malade. Carmilla, c’est la gamine de 15-17 ans avec l’air pâle et les yeux mornes, habillée de noir et ne bouffant rien pour ressembler à Avril Lavigne. Enfin, c’est ça mais au XIXème siècle. Et donc, elle n’en est que plus touchante.

En parlant de toucher, il faut aussi saluer les scènes osées, érotiques, délicieusement suggérées par Le Fanu. Les allusions lesbiennes, l’attirance de Laura pour Carmilla, les regards et les gestes tendres de Carmilla pour sa proie… C’est plus qu’implicite, là, alors quand je vois la retenue de [Stoker->48], qui pourtant écrit 25 ans plus tard, je me dis que Le Fanu était tout de même plus subversif. Carmilla, c’est l’histoire d’amour impossible, la vie et la mort, la femme et la femme… Et Carmilla, c’est le sexe aussi (dixit Frankie Vincent), le libertinage contre la morale puritaine, le blasphème contre un dieu en perte d’influence… Bref, dans Carmilla, il y a les ingrédients du vampire.

Carmilla est LE vampire féminin

Il reste une référence en la matière. Il est seulement dommage de constater que la plupart des adaptations cinématographiques du livre étaient prétextes à quelques scènes de baisers lesbiens, entre quelques pin-ups aux gros seins. Le potentiel de l’œuvre a-t-il donc été occulté ? Peu importe, Carmilla Karnstein restera dans nos esprits aux côtés de Dracula ou de Lestat, comme un vampire puissant et charismatique, dégageant une réelle aura envoûtante.

Note : 9/10

Comme je le dis, il vaut pour moi autant que Dracula. Les quelques défauts du scénarios sont pardonnés par la présence de Carmilla, un personnage génial, mythique. Quelques scènes qui resteront dans votre mémoire, comme l’arrivée de Carmilla ou la fin dans le château en ruine des Karnstein. On sait l’impact que ce livre a eu sur Bram Stocker.

Note : Pour ceux qui ont des problèmes de budget, Carmilla est entièrement téléchargeable sur internet. Ceci dit, il est en vente au prix de 2/3 € dans le commerce, comptez donc pas sur moi pour vous donner le lien.

Sagesse et jeunesse

arton103-80b22Wisdom is the province of the aged, but the heart of a child is pure.
Hrundi V. Bakshi
The Party, 1968

Cette citation de Peter Sellers me réchauffe souvent le coeur dans les nuits fiévreuses où je me retourne dans mon cercueil étroit pour trouver une raison à cette civilisation suicidaire.
Et sa vérité me transperce alors que je regarde la situation actuelle.

Les sages ont dit : “si tu voles une chanson, tu ira en prison.”

Profitant des vacances de la moitié de la france, le Conseil constitutionnel (les sages, donc, car on les appelle comme ça, dans les milieux qui se permettent de penser) a voté une loi DADVSI adaptée pour tous les citoyens. Grâce à eux nous pouvons enfin vivre heureux, car le moindre délinquant qui pique une chanson pourra finir en prison. Ouf !

Donc ces sages de la République… Mais attendez, pourquoi les appellent-t-on les sages ?

Parce qu’ils sont vieux ? Même pas.

Parce qu’ils ont fait science Po ou/et l’Ena ? Ah bah oui.

Donc si tu fais des hautes études (sponsorisées par papa-maman, ou alors si tu fais partie des méritants – il y en a (peu), j’en connais), tu as une chance, de devenir sage très jeune, et de voter une loi qui fout en prison quelqu’un qui va copier/coller un mp3.

Je balaie tout de suite les arguments du ministre machin : “mais on va pas mettre les gens en prison comme ça voyons, nous n’appliqueront la loi à la lettre.

En me confrontant à la vraie vie (donc pas celle des séries tv ou du 12h/13h de Pernaut), j’ai appris un truc : c’est que la loi est la loi.

Et que tout le monde est censé connaître la loi. Et que quiconque la transgressera aura la tête tranchée ou au moins suffisamment d’emmerdes pour arrêter d’être heureux (sauf si cette personne est président de la république, ministre de la république, ou même ami avec un ministre UMP).

Ce qui signifie que le ministre de la culture a beau nous raconter qu’il foutra jamais quelqu’un en tôle pour un mp3, qu’est-ce qui va se passer quand il sera plus là, et que petite crotte sera au pouvoir avec sa tolérance zéro ?

Vu que petite crotte ne peut plus aller en Corse sans (re)perdre la face, vu qu’il peut plus (re)mettre les pieds en banlieue sans déclencher des émeutes, vu que les tournantes à putes sont devenues clandestines, vu que les étrangers vont tous rentrer dans leurs pays (voir l’histoire de Aïssata et Mohammed), le pauvre futur président va devoir trouver de nouveaux “méchants” pour promouvoir sa politique de diabolisation des “autres” (vous savez, ceux qui nuisent à votre bien-être).

Alors quoi de plus horrible que des ados qui vivent dans le stupre (trop de branlettes), la drogue (trop de pétards) et la falsification (trop de mp3 copiés). Hop, en prison ! Ca fera des emplois chez ses potes de Bouygues (tf1) qui construiront des beaux centres pénitenciers pour mettre tous ces infâmes criminels.

Ah, la france enfin nettoyée et propre… Merci les sages.

A lire, un joli pamphlet d’Alain LANCELOT, un ancien du conseil constitutionnel : Eloge de la sagesse, où l’on retient que la sagesse n’est jamais personnelle, mais toujours partagée. Voilà une leçon qu’a dû oublier ce conseil de cons.

Réseaux sociaux, réseaux d’ado

Et pendant ce temps là, les jeunes volent des contenus pour faire leurs Skyblogs.

Vous avez déjà vu un Skyblog ? Un Skyblog C’est comme un MySpace mais en français et sans aucune valeur ajoutée, c’est à dire un endroit où des jeunes (et moins jeunes) gèrent des espaces d’excrétion libre.

Photos, textes, musiques, piqués sur des vrais sites web s’y côtoient.

Bon, ok, je dis ça parce que je trouve un site par mois tenu par un illettré qui copie-colle des pages entières de Morsure.net sur le blog en disant qu’il a écrit ça lui-même. C’est assez agaçant.

Heureusement ces skyblogs ne durent pas longtemps. Au bout de quelques mois, le propriétaire du blog, déçu par le peu d’amis qu’il s’est fait, va décider de radicalement changer son existence et va aller créer un blog sous Nrjblog, ou encore Canalblog ou Oldi-blog…

Sachez tout de même que chaque jour naissent plus de 2000 Skyblogs, et sont postés entre 200 000 et 400 000 photos et textes.

Et quelques mois plus tard, la plupart de ces blogs, textes et photos sont atomisés dans une petite explosion silencieuse d’électrons. Quel gâchis! Tous ces potentiels, toute cette envie de dire des trucs, toutes ces bonnes volontés, n’auront servi qu’à faire monter les actions d’AXA (propriétaire à 80% de Skyrock)…

Et pourtant cette envie de créer, de faire des trucs est géniale. Mais pour qui ? Pour quoi ? Quand on fait un truc c’est d’abord pour soi même (certains l’ont compris), pas pour avoir des amis.

Et quels amis vous aurez en copiant-collant des trucs qui ne sont pas à vous, qui ne sont pas vous ?

Et qui êtes vous en faisant croire que vous êtes l’auteur de ces contenus volés sur d’autres pages web, d’autres blogs ? Vous imaginez vraiment que ça va pas se voir? Petit skybloger qui est incapable d’écrire une phrase sans un « lol » dedans !

On reconnaît là l’attitude d’enfants innocents qui créent et détruisent sans comprendre ce qu’ils font. Une sorte d’exaltation gamine, d’adolescence no future !

Pour ma part je vous pardonne joyeusement, j’ai été jeune aussi. Mais faites attention aux Sages et à petite crotte. Bientôt, vous finirez en prison.

Amen

Morsure 2.0 Béta version

Pour les courageux qui ont lu cet édito jusqu’au bout, je vous annonce à vous (et pas aux autres, tant pis pour eux), qu’une nouvelle version de votre site préféré est en cours de finalisation.

Vous le savez, puisque vous êtes en train de le visiter.

L’intérêt de ce nouveau site (Morsure 2.0) est double :
-1- référencer correctement les articles grâce à un système de mot clé, ce qui permet de trouver un article de différentes manières (tags cloud, mot clé, rubriquage classique).
-2- vous permettre de commenter/donner votre avis sur les articles.

Ces commentaires vont demander une inscription préalable (obligatoire vu le niveau intellectuel de l’internaute moyen d’aujourd’hui, qui écrit des conneries plus vite que son ombre et aussi à cause des robots à spams qui traînent sur le web).

Cette version est une beta (c’est bêta)!

L’aspect visuel n’est pas finalisé. Autant le dire tout de suite, c’est très laid ! Alors si un artiste parmi vous a envie de me faire des propositions de maquette graphique, qu’il n’hésite pas.

Il manque des contenus ! Ceux écrit par les rédacteurs de morsure (ancienne version). Je vais essayer de vous contacter asap pour vous créer un accès spécial.

Sinon, un certain nombre de contenus (notamment sur les “[vrais vampyres->rub10]” vont être mis en zone privée. Il sera donc nécessaire de s’inscrire pour y parvenir.
Cette zone privée accueillera également tous les contenus pour “adultes”. Mais je vous en reparlerais à ce moment là.

Alors si vous voulez participer à cette grande encyclopédie vampirique, n’hésitez pas à devenir Scribe. Vous publierez un article qui sera validé par un archiviste avant d’être mis en ligne.

En attendant, je vais prendre quelques vacances bien méritées, au fin fond des Asturies, dans un vieux château poussiéreux.

Retour en septembre pour la finalisation de morsure.net 2.0 et sa mise en ligne effective.

Lestat le vampire

On pourrait même se prendre à rêver à une hypothétique rencontre avec cette ombre tourmentée oscillant entre deux mondes, rien que pour panser les plaies de son cœur meurtri balançant entre le plan des mortels et celui des non morts prédateurs impénitents parfois bien malgré eux.

Tous les vampiromanes épris de beauté, de voyages et de liberté ne peuvent que tomber sous le charme de ce Lestat anarchiste, assoiffé de renommée obsessionnelle, qui se lance à crocs éperdus dans l’exploration des sources vampiriques originelles. Un vampire galopin, libre penseur, attendrissant, farouchement opiniâtre, n’écoutant que ses propres lois, refusant ainsi de totalement mourir au monde et à ses êtres.

Oui, on devient véritablement addict au périple acharné de cette créature orpheline emplie de volonté indomptable, toujours habitée par cette étincelle d’humanité instinctive. Cette petite flamme vivace n’attend qu’un signal de notre part pour s’affranchir à jamais de toute aliénation imposée, luttant contre toute forme d’oppression. Comme si au fond, cette lueur nous soufflait “Soyez toujours vous-même, envers et contre tous ! Si vous vous sentez différents, montrez-le à la face de l’univers, hurlez-le sous les projecteurs, soyez-en fier car vous êtes beaux et forts d’être ce que vous êtes !”

Par conséquent, je pense que quelque part, tapi au creux de notre être, la “lueur d’un Lestat” sommeille. Oui, j’ai envie d’affirmer que ce cher Lestat représente l’arrogant porte-parole des causes marginalisées par la société.
Il apparaît ici au paroxysme de sa gloire, traversant les siècles doté du panache d’un dieu intemporel et brillant !

Anne Rice s’impose ici comme une maîtresse es vampire incontournable en livrant cette œuvre magistralement conçue.

Il a été, pour ma part, jubilatoire de suivre l’épopée de son héros qui émerge nettement du lot d’une pourtant séduisante galerie de personnages évoluant autour de lui. Avec ce livre, on voyage. Et Anne Rice nous procure vraiment l’étrange sensation “d’avoir connu” son Lestat.

Etait-il un fantasme jaillissant de sa part d’ombre goulûment attirée par ce séduisant vampire ? Qu’importe, car Lestat semble exister, lui et toute sa clique, nous emportant dans sa tornade épique ! Anne Rice nous fait don de son âme avec une crédibilité troublante, pleine de vents décadents.

Après une telle démonstration, essayez de vous convaincre que les vampires ne sont que des créatures purement surnaturelles…

Erzsébet Báthory

erzebeth bathoryErzsébet Báthory Nádasty
1560 – 1614
de sinistre mémoire

Tout amateur de vampire qui se respecte a déjà entendu parler de ce monstre national hongrois rendu célèbre par ses actes de cruauté. Les orgies sanguinaires que Bathory orchestrait en son sombre château valurent en effet à cette criminelle de haute lignée (elle était la nièce du futur roi de Pologne) le surnom de «bloody lady » : elle appartient au domaine vampirique au moins autant que Gilles de Rais ou Vlad Tepes.

Ah la famille…

La moindre des choses qu’on puisse dire, c’est qu’Erzsébet n’est pas née dans une famille de saints. Etant de sang royal, celle-ci se permettait des dérives, parfois criminelles. Les plus lointains ancêtres, sans doute les Huns, s’étaient d’ailleurs imposés en maîtres en faisant couler le sang à flots. D’eux, la famille garde des traditions et rituels occultes, un mode de pensée loin de la moralité catholique, bien qu’elle soit de confession chrétienne. Citons un frère attiré tant par les petites filles que par les vieilles dames, une tante grande dame de la cour de Hongrie défrayant la chronique à cause de ses mœurs lesbiennes auxquelles elle initiait de tendres fillettes. Il ne fait pas de doute que la nourrice de la petite Erzsébet a exercé une influence sur elle. Cette femme pratiquait la magie noire et des rituels pervers : on verra réapparaître ce personnage plus tard.

L’enfance d’Erzsébet

bathory comtesseC’est au milieu de cette charmante famille à laquelle les Adams eux-mêmes n’auraient sans doute pas aimé avoir affaire que grandit Erzsébet, élevée plus particulièrement, comme c’était la tradition, par sa future belle-mère qui l’assomme de saintes lectures et de prières. Or on voit l’effet que produisent les récits de la crucifixion et autres transcendants passages de la Bible sur certaines âmes. Pensons à la charmante Polyxena (elle aussi en découd avec une hérédité sanguinaire) de Meyrink dont la frénésie religieuse la rend hématophile… mais je m’égare. Elle a quatorze ans lorsqu’elle accouche, dit-on, d’une fille certainement issue de sa liaison avec un paysan. Sa vie sexuelle démarre donc assez tôt et sera d’emblée liée à la perte d’un enfant. A ce moment, elle était déjà fiancée à Férencz Nàdasdy, un comte appartenant à la meilleure noblesse hongroise, redoutable guerrier qui devint illustre et mérita, par la suite, le titre de “cavalier noir de la Hongrie”. A quinze ans, Erzsébet se marie. Nàdasty étant la plupart du temps à la guerre, c’est de fait elle qui gouverne l’austère château de Csejthe et ses vastes domaines. Nous n’en savons guère plus sur l’enfance de Bathory, sinon qu’elle était d’une nature solitaire et sujette à de fréquentes crises d’hystérie, encore tout cela est-il sujet à caution : cette période de sa vie, genèse de l’histoire de la plus fameuse tueuse en série de tous les temps, a été rendue (comme le reste), à jamais opaque et énigmatique, mais fascinante, par l’œuvre séculaire de l’imagination populaire.

Sa carrière criminelle

Tout commença, paraît-il, de la manière suivante : alors que la comtesse Bathory giflait une de ses domestiques qui lui avait malencontreusement tiré les cheveux, cette dernière se mit à saigner du nez et le sang rejaillit sur la main aristocratique. Quelques instants plus tard, elle découvrait sous le sang qui avait tâché sa main une peau devenue plus jeune, plus douce et plus blanche. Ni une, ni deux, elle fit égorger sa servante, aidée de son ancienne nourrice, Ilona Joo, devenue, depuis, son âme damnée, afin de prendre un bain de sang.

Comme l’expérience fut probante, mais son résultat passager, elle recommença avec d’autres jeunes filles qu’elle appâtait, avec l’aide d’Illona, d’une autre mystérieuse sorcière et de son nain Flisko, en leur faisant briller un poste de domestique au château ou par la menace, l’intimidation, les promesses d’argent, raffinant progressivement l’art de la mise à mort. Erszébet fit ainsi fabriquer un charmant jouet appelé vierge de fer que l’on trouve habituellement dans les salles de torture de l’Inquisition, sorte de statue qui se mettait à sourire lorsque ses bras embrassaient sa victime, la transperçant des cinq poignards qui lui tenaient lieu de seins.

Dame de fer nurmeberg bathoryCes atrocités sont perpétrées pendant environ une décennie avant sa mort, mais en réalité, son goût prononcé des supplices avait commencé de s’exprimer bien plus tôt, alors que son mari était encore de ce monde, comme peuvent en témoigner les actes de son procès. Bien qu’à cette époque, elle n’allât pas jusqu’à tuer ses victimes, cette virtuose es barbaries a-t-elle jamais été novice en matière de cruauté ? Le comte Nadasty, qui était au courant, ne se préoccupait pas outre mesure que sa femme noircisse à force de coups la peau des domestiques.

La comtesse employait plusieurs autres techniques pour recueillir le sang des jeunes filles, le plus souvent belles et vierges. Elle leur perçait la gorge, véritable vampire humain ; les engraissait, pensant que la quantité de sang augmentait en conséquence. On raconte même qu’après s’être baignée dans le sang fumant des vierges, elle demandait à des jeunes filles de lécher minutieusement tout son corps, prétendant que la rugosité du tissu agressait sa peau délicate.

Au cours de sa carrière criminelle, elle tortura et assassina des centaines de filles, on estime généralement un nombre de victimes supérieur à six-cent. Ce n’est pas pour ces victimes qu’on l’a arrêtée, mais parce que, folle de rage, elle assassina quasi publiquement une jeune soprano qui n’osait pas chanter devant elle. Pour châtier les deux femmes complices, on leur trancha le poing, puis on les brûla vives ; le nain Flisko subit la même amputation avant d’être privé de sa tête (était-ce de l’humour noir de la part du juge d’ordonner de raccourcir le nain ?). Quant à la sanglante comtesse, eu égard à son rang, elle fut emmurée dans l’un de ses châteaux, où elle décéda trois ans plus tard.

La beauté d’Erzsébet – Dracula et Erzsébet

Dans les rumeurs et, peut-être, les fantasmes qui nous parviennent, la comtesse était une très belle femme au teint de porcelaine laissant apparaître de fines veines par transparence. Cela correspond au canon de l’époque… et à la beauté vampirique décrite dans les romans. En réalité, un étrange mystère plane quant à sa véritable apparence physique. Plusieurs portraits la représentent, mais tous diffèrent : l’original a disparu et nous ignorons laquelle des versions est une copie du portrait original… si jamais il y en a une. Dans le manuscrit de Stoker, retrouvé dans les années 1970 par Raymond McNally, on peut lire le projet d’un épisode qui n’apparaît pas dans le roman, où un artiste est engagé pour faire le portrait de Dracula, mais le peintre n’y parvient jamais : le sujet finit toujours par ressembler à quelqu’un d’autre. Les similitudes de ces anecdotes sont troublantes, ne trouvez-vous pas ? D’ailleurs, Jacques Finné tente de démontrer qu’un lien de parenté existe avec le Dracula historique. Pour tortueuse et difficilement vérifiable, cette hypothèse n’est pas totalement invraisemblable.

Trois des portraits de Bathory; les spécialistes ne s’accordent pas : Penrose donne le deuxième comme l’original, mais Mac Nally mise sur le troisième…

Bathory1-5dea4bathory erzebethbathory Elisabeth

La femme

Erzsébet était un monstre qui profitait de sa position sociale pour matérialiser ses fantasmes morbides, mais pas seulement. Outre sa beauté, ce qui rend la terrible comtesse magyare fascinante, c’est qu’elle était une femme intelligente, qui a su manipuler et s’entourer d’étranges serviteurs fidèles tout droit sortis des enfers. Elle était cultivée, avait des connaissances ressortissant de cultes païens aussi bien que chrétiens ; polyglotte, elle se mêlait de politique et gérait plusieurs châteaux avec leurs domaines. Elle était peut-être aussi bisexuelle (il me semble de toute façon assez clair que ses crimes avaient un fondement d’ordre sexuel) : une femme déguisée en homme venait souvent lui rendre visite.

Vampire ou pas vampire ?

Au sens propre, a priori, non. Elle a bel et bien assassiné des centaines de jeunes filles, mais elle n’était pas cannibale et, vraisemblablement, malgré la légende, n’a pas pris de bain de sang. Tout comme Vlad Tepes mangeant des bouts de pain trempés dans du sang tient certainement du mythe. Mais qu’est-ce qui fait qu’on s’en souvient ? Les faits ou ce qu’on en retient, leur symbolique ? Le peuple, les romanciers et les cinéastes choisissent évidemment la deuxième option.

Au niveau de la symbolique, on est servis : sang, sexe, mort ; c’est la devise du vampire. Ajoutons à cela que la comtesse sanglante était à la recherche de la jeunesse éternelle et que lors de son arrestation, il est dit qu’on ne put que contempler une femme étonnamment belle et fraîche pour son âge, ce qui accentue en plus son côté femme fatale, inhérent aux femmes-vampires de fiction.

Une autre histoire nous parvient concernant un sombre personnage, un jeune homme au teint cadavérique, nommé Cadevrius Lecorpus. Il était vêtu de noir, ses yeux étaient d’obsidienne et de longs cheveux de jais encadraient son visage pâle. Les servantes de la comtesse allèrent jusqu’à raconter qu’il possédait des canines anormalement aiguës (l’anecdote a donc sûrement été inventée tardivement, puisque le vampire n’est muni de canines que depuis notre période romantique).

Remarquons encore qu’Erzsébet appartient à la haute aristocratie, comme c’est très souvent le cas pour les vampires de la littérature. Ainsi, Carmilla, la charmante créature aux penchants homosexuels dans le premier roman vampirique, est une comtesse. Aussi qu’elle est slave, comme il est de tradition que les vampires le soient, et que sa légende est quasi inséparable de son château de Csejthe où elle a perpétré grand nombre de ses forfaits et où elle fut emmurée, comme on ne se souvient pas de Dracula sans se rappeler de son château qui lui survit également. Dernière considération : elle était initiée aux sciences occultes, ce qui était aussi le cas de Dracula, que Stoker via Van Helsing nous décrit comme un des plus savants de son temps, ayant même participé à la mythique Scholomance, école généralement située en Transylvanie, où les leçons étaient prodiguées par Satan en personne.

Fiction

Comme de juste, Bathory a inspiré un certain nombre de romanciers, voici les principaux :

  • La Comtesse sanglante, de Valentine Penrose, le mieux écrit.
  • La Comtesse de sang, de Maurice Périsset, plus récent, mais reprenant à peu de choses près la même trame, en moins bien écrit.
  • Les Archives de Dracula, de Raymond Rudorff, dont Bathory n’est pas l’unique personnage principal.
  • « Sanguinarius », de Ray Russell, une brillante nouvelle.

Ouf, Erzsébet n’a pas encore inspiré de comédies musicales (j’espère ne pas donner d’idées), mais deux opéras rendent hommage à la féroce châtelaine :

  • Erzsébet : opéra pour une femme seule en six moments lyriques, de Ludovic Janvier et Charles Chaynes, représentation à l’Opéra de Paris en 1983
  • Erzsébet, de Dennis Bathory-Kitsz où l’auteur a choisi de mettre en perspective le personnage de la soprane assassinée et les relations d’Erzsébet avec ses complices. Vous pouvez en apprendre plus en consultant le site du compositeur : http://bathory.org (en anglais avec une page en français qui a paru aussi dans le Requiem n°7).

Les films :

penrose valentine Sources

  • Site de l’auteur d’un opéra sur Bathory, peut-être un descendant de la comtesse : http://bathory.org .
  • L’article de la Wikipédia consacré à la comtesse.
  • Le Livre secret des sorcières, Katherine Quenot, Albin Michel, 1997
  • Grand dictionnaire universel du XIXème siècle, Larousse
  • Vampire, portrait d’une ombre, collectif, sous la direction de Léa Silhol, éditions Oxymore, 1999
  • Les Maudits, Jacques Finné, Marabout, 1974
  • Requiem, les archives du vampirisme n°7 (avril-juin 1998), « Erzsébet Bathory, la comtesse sanglante », Cercle d’Etudes Vampiriques
  • perisset comtesse de sangLa Nuit de Walpurgis, de Gustav Meyrink, dont les éditions Flammarion ont eu l’excellente idée de nous offrir une nouvelle traduction en 2004. Ce chef d’œuvre ésotérique du fantastique pragois met en scène Polyxena, une figure de femme-vampire des plus fascinantes associée au mythe de la femme slave, vampire humain s’identifiant au portrait d’une lointaine aïeule. Et oui, encore une histoire de portraits.

« S’il est vrai qu’essentiellement “diabolique” signifie la coïncidence de la mort et de l’érotisme, pourrions-nous manquer si le diable n’est à la fin que notre folie, si nous pleurons, si de longs sanglots nous déchirent – ou si le fou rire nous prend –, pourrions-nous manquer d’apercevoir, liée à l’érotisme naissant, la préoccupation, la hantise de la mort ? »
Georges Bataille, « Les Larmes d’Eros »

E-VDN

evdn vampires dark newsE-Vampire Dark News est une newsletter qui vous permet de vous tenir informé de toute l’actualité des vampires en France et à travers le monde : littérature, cinéma, arts, évènements, etc… Vous pouvez librement consulter l’édition du jour ou les anciens numéros.

Depuis 2001, l’Evdn fait le régal des amateurs de vampires en france.

Un exceptionnel travail de compilation, très bien documenté et illustré, et tout ça gratuitement, oui madame.

Ajout 2009 :  à priori, VDN a arreté sa diffusion en 2006. Mais vous puvez toujours consultez les archives ici.

Vampire Dark News

Créé en 1995 par un petit groupe de passionnés par le mythe du Vampire (dont Slash et Simmu), l’Association Vampire Story a publié chaque trimestre pendant 5 ans le fanzine Vampire Dark News.

Au fils des années, plus de 15 numéros se sont succédés… proposant des chroniques de livres, de films, de BD, des rencontres avec des auteurs et artistes reconnus et ouvrant ses pages a de nombreux jeunes auteurs…

En 1999, celui-ci s’est transformé en webzine, le bien connu e-VDN, avec la création de vampiredarknews.com.

Cette association a démarré une activité d’édition littéraire avec la publication de sa première anthologie: Millenium Vampire.

Rajout 2009 : Vampire Dark news a évolué vers VDN City dont voilà la magnifique map ci-dessous :

vampire dark news city