Le syndrome de Renfield

reinfieldLes psy (chanalystes, chiatres, logues, chotrucs), pour expliquer les cas dont ils s’occupent et tout faire rentrer dans des cases bien comme il faut, aiment bien se référer à des mythes. Freud, c’était Oedipe, pour les tueurs sanguinaires, il y a les vampires. Sans compter que c’est un mot qui plaît particulièrement aux media et aux procureurs dans les affaires les plus sordides : “vampire” devient synonyme de “monstre”, alors que souvent, le comportement du tueur n’a pas de rapport, à proprement parler, avec le vampirisme clinique. On parle donc fréquemment de vampires pour des meurtres choquants, mais les véritables cas de vampirisme clinique, comme les décrit Richard Noll, sont finalement assez peu courants.

Il me semble pourtant que l’on pourrait, au vu de la nature des actes commis et des antécédents parfois connus, rapprocher certains criminels de cette typologie : Fritz Haarman, Peter Kürten, Andrei Chikatilo, ou encore John Haig ; le cas de Richard Trenton Chase semble vraiment assez particulier…

richard-noll-vampiresRichard Noll, dans son livre (Vampires, Werewolves, & Demons. Twentieth Century Reports in the Psychiatric Literature. Richard Noll. Brunner/Mazel Publishing, Inc. New York, 1992.) publié en 1992, n’invente pas le syndrome de Renfield : il propose simplement de le rebaptiser ainsi, en référence au personnage créé par Bram Stoker, qui montre des signes et symptômes classiques de ce trouble. Il pense d’ailleurs que Stoker s’est inspiré du célèbre neurologiste et psychiatre allemand Richard van Krafft-Ebing (Richard van Krafft-Ebing : psychanalyste ayant publié un article sur les Cent-vingt journées de Sodome de Sade dont il se sert pour illustrer toutes les déviances possibles de ce qu’il a appelé le sadisme.), lequel parle de nombreux cas de meurtres comprenant la nécrophagie, la nécrophilie, l’ingestion de sang et l’excitation sexuelle que certains individus ne peuvent obtenir que lorsqu’ils font couler du sang frais de leurs partenaires sexuels, ou qu’ils s’imaginent en train de le faire. Plus fondamentalement, pense Noll, c’est le fait de violer un tabou culturel, ici, boire du sang, qui serait l’origine de la maladie : en effet, l’interdit, c’est excitant !

A partir de cette idée et de l’étude de nombreux cas de vampirisme clinique, il propose une caractérisation et une évolution type par étapes du syndrome de Renfield :

“Le plus souvent, c’est un événement particulier qui conduit au développement du vampirisme (c’est-à-dire l’ingestion de sang). Habituellement, cela se passe pendant l’enfance et l’expérience d’un saignement ou bien le goût du sang est vécue comme “excitante”. Après la puberté, cette excitation associée au sang est ressentie comme ayant une nature sexuelle.” John Haig, dans ses Mémoires, racontera qu’il a effectivement vécu une telle expérience pendant son enfance.

renfield2“L’autovampirisme est généralement développé en premier, habituellement pendant l’enfance, initialement par des grattages et des coupures de la peau pour faire apparaître du sang, qui est ingéré et plus tard, en apprenant comment ouvrir les principaux vaisseaux (veines, artères) afin de boire un flot régulier de sang chaud plus directement. Le sang peut alors être ingéré au moment de l’ouverture, ou être conservé dans des récipients pour être bu plus tard ou pour d’autres raisons. La masturbation accompagne souvent les pratiques d’autovampirisme.

La zoophagie (littéralement, le fait de manger des créatures vivantes, mais plus spécifiquement, l’ingestion de leur sang) peut se développer avant l’autovampirisme dans certains cas, mais c’est habituellement le stade suivant. Les personnes atteintes du syndrome de Renfield peuvent attraper, manger ou boire eux-mêmes des créatures comme les insectes, les chats, les chiens ou les oiseaux. Le sang des autres espèces peut être obtenu à l’abattoir. L’activité sexuelle peut ou non accompagner ces actes.” On retrouve bien ici le comportement du personnage du roman, qui élève dans sa chambre des araignées qu’il mange ou fait manger par des animaux plus grands, pour finir lui-même par les manger.

renfield3“Le vampirisme dans sa véritable forme est le prochain stade de développement – se procurer et boire le sang d’êtres humains. Cela peut se faire en volant du sang dans les hôpitaux, les laboratoires… ou en tentant de boire directement du sang sur d’autres personnes. Habituellement, cela implique des activités sexuelles en rapport avec ces actes, mais dans les cas typiques de meurtres et dans les crimes violents, l’activité sexuelle et le vampirisme ne sont pas forcément liés.

Le besoin de boire du sang s’associe presque toujours à une composante sexuelle.
Le sang prendra parfois une signification quasi mystique en tant que symbole sexué de la vie ou du pouvoir et en tant que tel, une expérience de bien-être ou de puissance.

Les personnes souffrant du syndrome de Renfield sont essentiellement des hommes.

renfield4La définition des caractéristiques du syndrome de Renfield est le besoin de sang. Les activités comme la nécrophilie et la nécrophagie, si elles n’ont pas pour but l’ingestion de sang, ne sont pas considérées comme des aspects de ce trouble.” Ainsi, d’après cette dernière précision, on ne peut pas classer Sergent François Bertrand ou Henri Blot comme des vampires cliniques.

Se fait jour désormais, à mon avis, un comportement qui aboutit au même genre de dérives mais dont un aspect important est l’identification au personnage de fiction qu’est le vampire. Les cas dont parle Richard Noll ne se prennent pas pour des vampires : ce sont, comme je l’ai dit plus haut, les psy et les média qui les nomment ainsi, eux ou leurs symptômes, par commodité. Mais certains crimes récents montrent que leurs auteurs se prennent pour des vampires ou vénèrent son mythe.

3 thoughts on “Le syndrome de Renfield”

  1. Un syndrome c’est pas rien! D’abord c’est un mot sérieux, la preuve c’est qu’il vient du grec -tous les mots sérieux viennent du grec.
    En médecine c’est “l’ensemble des signes et des symptômes qui caractérisent une maladie”; en psycho clinique c’est la même chose mais dans la tête.
    Le syndrome implique une unité qualitative, un “ça, ça va avec ça” des symptômes. Donc avant d’être un mot qui fait joli dans la phrase, c’est un outil diagnostic. Si vous avez le nez qui coule et des frissons, il se pourrait bien que vous soyez enrhumé, si vous empoisonnez votre bébé à la mort au rat avant d’appeler les secours, il est probable que vous souffriez du syndrome de Munchausen par procuration. Et dans ce dernier cas, on peut prédire que vous ne vous arrêterez pas avant la camisole. Diagnostic signifie aussi prédictif.

    Si Noll n’invente pas le “vampirisme clinique”, il s’applique à lui trouver des stades et à nous mettre un joli noeud cadeau là dessus avec une étiquette. Il semble alors légitime de se demander où est-ce qu’il a trouvé suffisamment de vampires volontaires pour se permettre de généraliser ça avec des stades, des considérations sur les motivations intrinsèques (le sexe, encore et toujours), l’évolution des symptômes, tout ça sur le ton le plus docte et le plus professionnel qui soit.

    N’ayant pas lu l’ouvrage, j’ai posé la question par mail à Senhal qui m’a répondu que le monsieur s’était apuyé sur la littérature clinique antérieure, notamment sur le momifié Kraft-Ebbing -auteur qui a largement dépassé la date de péremption, mais n’avait pas pris la peine d’étudier de cas clinique. En gros, le type a lu Dracula, frissonné en découvrant les méfaits d’une demi-douzaine de serial killers et s’est déclaré spécialiste de la picole au sang? A moins que quelque chose ne m’échappe? En attendant je me demande quand même à quel stade, 3 ou 4, du syndrôme d’incompétence serait-on en droit de situer Noll.

  2. Eum… Melmothia Darling, vois-tu c’est que Noll là… ben il a raison. Le seul point où il a tort c’est qu’il ne dit pas que la troisième étape est tout à fait optionel. (je sais de koi je parle j’ai sauté cette étape car je n’ai jamais trouver l’idée de boire le sang des animaux très attirante… ) bref… ton Noll a raison et toi tu te ridiculise en le critiquant de la sorte…

    (Tout ce que je n’aime pas de Noll, c’est qu’il est «normal» et que donc, pour lui, tout ce qui est différent dans la psycologie de quelqu’un est une maladie mentale… mais bon on n’y peut rien… C’est la fatalité de la normalité…)

    Bleh… 😛

  3. VolKanO, apprends à lire avant de dire que les autres se ridiculisent…

    Maintenant, un super jeu : ma traduction comprend un gros contre sens, saurez-vous le retrouver ?

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